Salomon Glück
né le 5 novembre 1914

 

Salomon Glück enfant

Le Docteur Abraham Salomon Glück est né le 5 novembre 1914 à Zurich en Suisse, où il a passé sa prime enfance. Son père était Pinkas Glück (Paul), né le 10 août 1886 à Tarnow en Galicie (partie de l’Empire austro-hongrois), fils de Reb Yisroel, fils de Reb Abe Zalke Friedman et de Feïge Perel Glück, n’ayant pas le droit de se marier civilement, d’où le fait qu’il porte le nom de sa mère, émigrant en Autriche vers l’année 1910, tailleur de diamants à Anvers, en Suisse pendant la première guerre mondiale, colporteur en Allemagne, installé à Cologne qu’il quitte en 1921 avec sa famille pour immigrer en France. Colporteur en Alsace, puis commerçant à Strasbourg et à Paris, 8 rue des Messageries.

Sa mère était Henia Hélène Shipper, née le 9 mai 1887 à Dzikov (Galicie), fille de Reb Leizer Schipper et de Kraïndl Fenster. Ses parents s’étaient mariés le 4 juillet 1910 à Tarnow.

Il était le frère d’Antoinette, épouse David Feuerwerker ; de Heïdi, épouse Yehiel Naftalis ; et de Rose, épouse Nahum Warfman.

En 1921 il émigre à Strasbourg avec sa famille où il fera ses études secondaires au lycée Fustel de Coulanges. Puis, après un déménagement, il achèvera ses études de terminales 1ère sciences et math-élém au lycée Kléber.

Il sera naturalisé français en 1926. Il poursuivra des études de médecine, achèvera son externat et obtiendra le titre de docteur en médecine, après avoir soutenu sa thèse.

En préparant son internat, il a passé un concours hospitalier à Londres (Grande-Bretagne) auquel il a été reçu en 1938, et il travaillera à Londres comme médecin hospitalier jusqu’à la déclaration de guerre.

En 1939, refusant de bénéficier de son éloignement à Londres, et voulant exprimer sa reconnaissance envers le pays qui l’a accueilli ainsi que sa famille, il rentrera en France pour se battre contre le fascisme et sera recruté à Strasbourg le 16 septembre 1939 (matricule 1572), incorporé et affecté au 146e RIF, envoyé sur la ligne Maginot comme médecin sous-lieutenant, pendant la campagne de 1939-1940, et sera fait prisonnier militaire à l’Oflag 12 b.

Bizarrerie des nazis : les médecins juifs ont été parmi les premiers prisonniers militaires libérés (un autre destin leur étant réservé). Salomon Glück laissera un souvenir auprès de ses camarades qui sont restés et qui témoigneront après la guerre de son sens du partage, de la justice, et de la dignité (témoignage du Dr Francillon). Il sera libéré en 1941 de l’oflag 12 b et décoré de la Croix de Guerre.

N’ayant plus le droit d’exercer en tant que médecin parce que juif, selon les lois de Vichy de l’État français, il continuera malgré tout à travailler comme médecin de l’OSE (Œuvre de secours aux Enfants) à Brou Vernet, en Savoie.

Il laissera un souvenir impérissable dans la mémoire de ces enfants qui avaient tout perdu (témoignages Gerstenkorn, Paris - Raymonde Tziboulsky, Genève - Guillaume Friedman, Montréal).

Parti de Brou Vernet après le démantèlement ou la liquidation de cette maison d’enfants, parce qu’il a été dénoncé, il se réfugie à Brive-la-Gaillarde en Corrèze, avenue Turgot, où il rejoint dans la Résistance ses sœurs et son beau-frère, le rabbin David Feuerwerker, aux côtés d’Edmond Michelet, dans le réseau « Combat ».

Après le recensement de 1943, les rafles de Brive et l’arrestation de sa sœur Rose Glück, déportée à Auschwitz, il se réfugie à nouveau à Lyon vers février 1944, où il participe à la Résistance.

D’après le témoignage de sa cousine Clairette Jossot, qui a assisté à son arrestation, lors d’une mission pour la Résistance, il serait passé un soir chez ses parents pour les embrasser. Il y avait là son père, sa mère, sa sœur Heidi et sa cousine Clairette. Au bout d’un certain temps après l’heure du couvre-feu, ils ont entendu frapper à la porte mais n’ont pas répondu. Salomon Glück aurait ouvert la fenêtre pour s’échapper par les toits, mais il y aurait renoncé en disant : « Aucune chance, ils vont me tirer comme un lapin. »

Au bout d’un moment, malgré l’intervention d’un serrurier, la porte a cédé sous les coups de boutoirs ; deux miliciens français et un Allemand ont fait violemment irruption dans l’appartement et les deux miliciens se sont jetés sur les deux hommes présents, le père et le fils, l’Allemand tenant en joue la mère et la sœur en pointant directement son calibre sur la joue gauche de la jeune Clairette, âgée de quinze ans.

Pinkas Glück à été traîné par la barbe à travers la pièce, accompagné de coups de poings, de coups de bottes et d’invectives. De son côté, Salomon Glück a été projeté au sol et roué de coups de bottes systématiquement sur la tête, le ventre et les parties génitales. Voulant sans doute retourner contre lui toute la haine des miliciens en espérant épargner son père, il a déclaré être résistant. Ils lui ont alors demandé combien de morts il avait à son actif, et devant ses dénégations où il arguait qu’il était médecin et que sa vocation n’était pas de tuer mais au contraire de soigner, les coups ont redoublé.

La séance aurait duré une demi-heure, les miliciens auraient arrêté les coups, mais se seraient acharnés sur les meubles dont ils se servaient comme projectiles. Une valise en osier aurait été projetée sur l’unique lampe du plafonnier et, brusquement, ils se sont retrouvés dans le noir. Avec leurs lampes de poche ils ont continué à s’acharner sur Salomon Glück. Puis ils se sont concertés, ne pouvant emmener tout le monde : leur véhicule était trop petit, étant donné qu’à l’origine ils ne venaient arrêter qu’un couple, les précédents locataires des lieux.

Les miliciens voulant emmener la jeune fille de quinze ans, l’Allemand s’y serait opposé. Et en définitive ils n’ont embarqué que Salomon Glück.

C’est sous les coups et ses hurlements de douleurs qu’ils lui ont fait descendre l’escalier, jusqu’au véhicule qui les attendait dehors. Le seul cri arraché fut un « maman » lancé dans la nuit et un dernier regard échangé avec sa mère qui s’était précipitée à la fenêtre, avant d’être projeté dans le véhicule et de disparaître dans la nuit et le brouillard.

Pris à Lyon, emmené au fort de Montluc puis interné à Drancy le 11 mai 1944 sous le n° 21530, il sera déporté le 15 mai 1944 avec le convoi 73, composé de 878 hommes juifs. Direction Kovno ou Reval ? Dans l’ignorance de la date de son décès, son père avait décidé de commémorer son yourtzeit le 19 sivan, qui était la date anniversaire de son propre grand-père Reb Abe Zalke dont il lui avait donné le nom.

Supplicié sans sépulture (sans doute lors d’une corvée de bois, d’après le témoignage de Zysia Herclich, un des rares survivants de ce convoi), son nom est inscrit sur la tombe de ses propres parents en Eretz Ysraël.

Son nom à été donné à des neveux et arrière-petits-neveux et petites-nièces.

Familles Feuerwerker, Naftalis, Warfman.
Ses sœurs Antoinette, Heidi _’_, Rose.
Ses neveux et nièces :
Atara, Natanya, Elie, Hillel, Emmanuel,
Benjamine, Bernard, Marc, Anne, Michaëlle.

 

Bernard (neveu de Salomon) entre ses grands-parents.
Derrière lui, Rosa, sa mère, qui a survécu à Auschwitz.
À droite, sa tante Heidi (vers 1950)

 

Salomon Glück (1941)

 

Salomon Glück (1941)